Droit d’accès post mortem aux données à caractère personnel : le Conseil d’Etat apporte une intéressante précision

Par un arrêt du 7 juin 2017, le Conseil d’Etat apporte une intéressante précision relative au droit d’accès aux données à caractère personnel. Pour mémoire, l’article 39 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés dispose que « I. – Toute personne physique justifiant de son identité a le droit d’interroger le responsable d’un traitement de données à caractère personnel en vue d’obtenir : (…) 4° La communication, sous une forme accessible, des données à caractère personnel qui la concernent ainsi que de toute information disponible quant à l’origine de celles-ci (…) ». C’est notamment en application de ces dispositions que certains réseaux sociaux, comme Facebook, permettent à l’utilisateur de procéder à la récupération dans un format exploitable des données à caractère personnel qu’elles ont apportées au réseau.

Au regard de la formulation de ces dispositions, il est possible de s’interroger sur la nature personnelle de ce droit. Plus précisément, les ayants droit peuvent-ils invoquer ce texte pour récupérer les données d’une personne décédée ?  La réponse à cette question est négative, ce qui est cohérent au regard de la définition de la notion de « personne concernée » par une traitement de données à caractère personnel (article 2 de la loi). Mais les choses sont différentes si la communication des données est demandée dans le cadre d’un contentieux indemnitaire déclenché du vivant de la victime et transmis à son décès à ses héritiers. Dans ce cas, ces derniers deviennent des « personnes concernées » au sens de la loi de 1978, car leur demande n’est pas faite en leur nom propre, mais en réalité au nom et pour le compte de la personne décédée dont elles portent les intérêts.

C’est ce que juge le Conseil d’Etat en considérant : « Toutefois, lorsque la victime d’un dommage décède, son droit à la réparation de ce dommage, entré dans son patrimoine, est transmis à ses héritiers, saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt en application du premier alinéa de l’article 724 du code civil. Par suite, lorsque la victime a engagé une action en réparation avant son décès ou lorsque ses héritiers ont ultérieurement eux-mêmes engagé une telle action, ces derniers doivent être regardés comme des  » personnes concernées  » au sens des articles 2 et 39 de la loi du 6 janvier 1978 pour l’exercice de leur droit d’accès aux données à caractère personnel concernant le défunt, dans la mesure nécessaire à l’établissement du préjudice que ce dernier a subi en vue de sa réparation et pour les seuls besoins de l’instance engagée ».

Il s’agit là d’une précision intéressante apportée à la notion de « personne concernée » au sens de l’article 2 de la loi de 1978, mais qui éclairera aussi selon toute vraisemblance le champ d’application du règlement européen relatif à la protection des données à caractère personnel, qui entrera en application le 25 mai 2018.

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